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Le portrait de la semaine: Mohamed Drizza en pleine ascension

Cette fois, c’est sûr, les mauvais souvenirs ont fané. Mohamed Drizza s’est définitivement délesté de ces jours confus qui l’ont rongé pendant près d’un an. C’était en 2004-2005, le charme de l’arbitrage s’étiole. Il traîne la misère et les mauvais songes. Propulsé trop vite, trop jeune tel un aventurier sans boussole dans la jungle de l’élite. “Je n’étais pas assez mûr, sans expérience du jeu, de la vie”. Le troisième chaînon d’une fratrie de quatre enfants (deux grandes sœurs et un frère cadet) est marqué par cet épisode trop précoce. Durant trois ans, il flânera dans les divisions inférieures. Sans grande motivation. Il sera même sanctionné pour avoir oublié de se présenter à certains stages. C’est le temps des nonchalances, des demi-lunes. Il rejoint sa sœur à Montpellier et chasse ses minutes de doute, passe ses heures à cultiver son champ plein de cailloux pour le rendre fertile. “Je me suis relancé, Francis Desplas m’a redonné une chance”. En 2006, il pousse à nouveau les battants de l’ambition. “Là, c’était un homme avec davantage d’assurance qui foulait les pelouses”, concède celui qui s’entraîne six à huit heures par semaine (natation, vélo, musculation et jogging). Et les petites joies s’amoncellent : finale du championnat de France 2008 à Béziers (Lézignan-Pia), finale de la Coupe 2009 (ASC-Limoux). Et un secret espoir emmitouflé dans le mouchoir : diriger la finale du championnat 2010. “Car elle se déroule chez moi, à Montpellier”.

A 29 ans, le grand homme se régale du petit bonheur de se sentir simplement serein, apaisé. Aujourd’hui, le natif de Villefranche-sur-Saône a du soleil plein les yeux. Le championnat domestique, le Championship anglais où il ne fut pas loin d’être la révélation l’an dernier. Référencé fine lame. Et désormais, il ne veut plus quitter le bon sillon.

Jamais avec un sifflet

Et dire que gamin, il avait juré qu’on ne l’y prendrait jamais, un sifflet à la bouche. “Mes parents ont déménagé lorsque j’avais dix ans. Nous sommes descendus vivre à Carpentras “. La famille trouve un logement, à une portée de drop de La Roseraie. “Même si j’étais davantage football à la base, je me suis très vite intéressé au XIII, jusqu’à en devenir progressivement un spectateur attentif et régulier”. Mais pas question de mouiller le maillot. “Je suis grand, élancé, fin, j’aurais volé au premier tampon”.

“Et puis, à 19 ans, alors qu’il manquait du monde pour diriger les matches du Challenge de l’Avenir à Carpentras, on m’a tendu un sifflet. Et cela m’a immédiatement plu”. Une révélation. “Ce côté autoritaire, directeur du jeu, porteur des valeurs et de justice… On m’a poussé à poursuivre”. Sous la férule de Jean-Sébastien Gras, arbitre élite également originaire de Carpentras, “son mentor, son modèle”, il intègre l’école d’arbitrage. Sa progression est fulgurante. Moins de trois ans plus tard, il dirige déjà en élite. Cap vers le stade Ambert pour un Pia-St-Gaudens qui sent le souffre. S’ensuivront quelques matches dont un Villeneuve-St-Gaudens où ce titulaire d’un Masters de géographie, connaîtra une sortie difficile. La passion s’effiloche. Mais le garçon revient plus fort quelques saisons plus loin.

Aujourd’hui, celui qui est considéré comme le meilleur arbitre tricolore, derrière Thierry Alibert, a tapé dans l’œil des Anglais. “C’était en 2008. Ils avaient retenu trois arbitres français pour diriger des matches de Cup. Celui qu’ils estimaient avoir été le plus méritant se voyait retenu pour le tour suivant. Et j’ai eu la chance d’être celui-là pour diriger Workington-Hull KR”. Il caresse le plus haut niveau. Stuart Cummings, le boss de l’arbitrage anglais, croit en cette nouvelle pépite et le programme sur huit matches de Championship en 2009 dont un baptême Blackpool-Dewsburry (chaque rencontre est rémunérée 175 euros). “Globalement, cela s’est bien passé. La RFL était satisfaite de mon placement, de mes déplacements, de ma gestion des conflits. En revanche, je dois progresser dans le respect des dix mètres, les ralentissements de tenus”, admet celui qui est accueilli au son de la Marseillaise, lors de chaque debriefing collectif. “C’est sûr, c’est un autre monde”. Cette année, le conseiller principal d’éducation au collège Lascazes de Montpellier, poursuivra l’expérience outre-manche dans quelques semaines, mais continuera néanmoins à exercer parallèlement sur les pelouses françaises. Alors qu’il observe la Super League de la pointe du regard, le féru de philosophie, grand admirateur de Michaël Phelps et d’Usain Bolt, ne masque pas son ambition. Imiter Thierry Alibert et, pourquoi pas, le rejoindre dans les rangs des arbitres professionnels. “Il a ouvert la voie. C’est un modèle. Physiquement, c’est un monstre. Il a fait tellement de sacrifices qu’il mérite tout ce qui lui arrive. Alors c’est vrai, pourquoi ne pas être le deuxième envahisseur de la Super League”, admet-il dans un dernier sourire.

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